Fenêtre sur cour

Ça y est, on le faisait. Il réalisait mon fantasme. On baisait contre sa baie vitrée. L'appartement était plongé dans la pénombre et la ville s'étalait à nos pieds.

Stop. On rembobine. Ça, c'était dans ma tête. En réalité. On avait vue sur l'appartement d'en face. Pas si loin que ça. Ils mataient un James Bond à la télé, si mes yeux ne me trompaient pas. Et il y avait l'aire de jeux des gosses pas loin. On n'était pas à New-York ou ailleurs, dans un building. On était perdu dans une petite ville de province et le quatrième étage était l'avant-dernier. Il n'y avait pas de baie vitrée, mais une fenêtre.

Et il ne me baisait pas. Monsieur avait posé ses conditions. Il m'enculait. Assez brutalement. C'était du low-cost et pourtant je prenais mon pied. Le remerciant silencieusement. Bien sûr, peut-être que plus tard, je testerais en version premium ... mais en attendant cela me suffirait pour très longtemps. Dans ma tête, tout y était. Je criais son nom à chaque coup de boutoir. Il grondait le mien, comme une menace. Il me rendait folle. Je ne retenais plus mes cris. Que les voisins appellent les flics, si ça leur chante. Que je le rende sourd momentanément. Je m'en carrais complet. Il aurait sans doute aimé m'avoir plus silencieuse et raisonnable pour le bien de son audition et des bonnes relations de voisinage, mais il ne faisait rien pour me calmer, au contraire. Même ses chut sonnaient faux.

" Oh putain de bordel de... Aïe ! "

Il me pilonna avec encore plus force.

" On ne jure pas. 

- Oui, Monsieur... "

Une voix contrite mais les yeux au ciel. Comme si ça le gênait. Il cherchait juste un prétexte pour me punir, reprendre la main. Ma liste de griefs était longue pourtant, il n'avait qu'à piocher. Mais non. Il voulait un truc d'ici et maintenant.

Mes cris oscillaient entre suraigu et basse grave. Feulements enroués et voix si claire. J'allais vraiment niquer le sommeil du type d'à côté. À part si ça l'excitait d'être voyeur auditif. Ou si c'était un gros dormeur au sommeil lourd.

Et moi, est-ce qu'imaginer un mec qui se masturbe en m'entendant me faisait bander ? Enfin mouiller... J'en savais rien. Peut-être que oui, sur le moment. Un rien me faisait vriller de toute façon. Mes seins subitement plaqués contre la vitre froide me ramenèrent à l'instant présent. C'est fou que malgré cette intensité, j'arrive encore à m'évader. Je ne faisais pas ma liste de courses. Mais bon quand même...