Vice-versa

Il sortait de la douche en boxer, mais je n'avais pas le temps de m'attarder sur la vue qu'il m'offrait. Je le bloquai subitement contre la balustrade.
"Eh bien, eh bien que me vaut cet assaut ?"
Surpris, il me laissa faire. Je crois qu'il n'était pas contre mon initiative. En tout cas, pour le moment. Je lui souriais de toutes mes dents. Il devait bien se douter que mes intentions n'étaient pas pures.
J'avais laissé traîner mon écharpe sur le rebord et l'attrapai rapidement pour lui attacher les bras à la rambarde dans son dos.
"Tu vas voir... Tu me puniras si tu veux. Mais plus tard. Pour l'instant, laisse-toi faire. Et râle pas."
Il me regardait si sévèrement, j'eus un doute. Et si j'allais trop loin ? Notre accord n'avait jamais parlé de ce genre de configuration après tout.
"Rouge, si tu veux arrêter. Mais si tu l'utilises à mauvais escient, je te punirais.
-Voyez-vous cela..."
C'était pire qu'une menace, un défi peut-être ? Au moins, il acceptait de jouer mon jeu même si je m'en mordrais les doigts plus tard. Ses yeux me lançaient des éclairs. Je frissonnais malgré moi. Je n'allais jamais avoir le cran, autant arrêter tout de suite, je le supplierais de me pardonner ce moment d'égarement. Je rêvais, il n'avait jamais cédé, et ce n'était pas aujourd'hui qu'il le ferait, surtout après ça. Alors quitte à être punie, autant l'être pour quelque chose. J'allais y arriver. Je respirai profondément, me reculant pour admirer mon œuvre.
"Tu es beau, Soumis."
Son large sourire sadique m'indiquait qu'il était déjà en train de chercher comment m'en faire payer le prix fort, dès qu'il serait libre.
Je mourrais d'envie de caresser sa barbe, de passer mes doigts dans ses cheveux, d'effleurer ses lèvres. Mais je me retins, j'aurais dépassé les limites acceptables. Pas touche à son visage, c'était noir sur blanc depuis nos débuts. Je ne pourrais jamais transgresser cela même si je l'avais rendu pour l'instant inoffensif. Je retournai chercher d'autres cordes. Il ne se débattait pas, scrutant mes faits et gestes. Je sentais la pression de son observation peser sur mes épaules. J'aurais presque aimé qu'il pestât, se débattît, ça m'aurait été moins pénible. J'essayais de m'appliquer en faisant abstraction de la bête curieuse que je contraignais. À présent, mes liens l'arrimaient à la rambarde ; jambes légèrement écartées, son dos ne pouvait plus se décoller de la barre métallique en fer forgé. J'espérais qu'il ressentait, lui aussi, le toucher froid contre lequel il m'avait déjà plusieurs fois attachée. Je voulais secrètement, qu'à son tour, les arabesques marquassent joliment son épiderme quand je lui rendrai sa liberté.
Je laissais courir mes doigts sur sa peau, encore légèrement humide. Je m'amusais à rassembler les quelques gouttelettes qui subsistaient. Puis, de mes ongles, je le frôlai. Il grogna.
"Tout doux, mon beau."
J'avais l'impression d'avoir affaire à un chien sauvage. Je tournai autour de ses tétons qui avaient l'air plus sensible que les miens. Je griffai un peu son torse, avant de planter mes dents pour le mordiller. Une bordée d'injures vola.
"Quelle chochotte !"
Je rougis, j'avais peur d'avoir réellement fait une bêtise. J'étais certaine d'avoir maîtrisé ma force et qu'il en rajoutait beaucoup pour que je culpabilisasse. Mais il me faisait douter, à présent.
"On verra tout à l'heure, qui est la chochotte..."
Il allumait des feux en moi qui cramaient mes entrailles. J'eus presque la tentation de tout arrêter pour subir ses représailles maintenant. Presque. Il fallait que sa punition soit à la hauteur de ma faute. J'avais besoin qu'il me fît totalement abdiquer et pour cela je devais aller plus loin, beaucoup plus loin. Il n'aurait ainsi pas une seule seconde pitié et ça m'allait. Je voulais voir la détermination dans son regard, et trembler sachant qu'il ne reviendrait pas sur sa décision. Je subirai, gémissante. Je sentais déjà sa poigne se refermer sur mes cheveux. Je le dévorais imaginant toutes les tortures qu'il me promettait. Je m'ébrouai pour me sortir de ma douce torpeur. J'anticipais trop. Pour le moment, il était encore à ma merci. Je sortis sa queue de son caleçon, me félicitant d'avoir bien mis mes nœuds pour ne pas l'entraver. C'était une première et j'en étais fière. Me léchant les lèvres, je m'accroupis devant lui en demi-érection, pour ensuite y laisser glisser ma langue. Il tressaillit. Un petit temps, ce manège me divertit. Puis, me redressant je lui adressai un petit clin d'œil avant d'ouvrir en grand la porte de sa chambre. Je roulai du cul pour gagner son lit donnant pile poil sur le couloir et lui. J'espérais toutefois ne pas être trop ridicule. Chassant mes craintes, je m'allongeai sur la couette, me calant contre les oreillers. Son sourire carnassier me rassura. Il avait envie de moi, autant que moi de lui. Rassérénée, je plantais mes prunelles dans les siennes, ouvrant grand mes cuisses. Sans pudeur. Presque comme un mec. Je savais qu'il ne pouvait ignorer que ma fente dégoulinait alors que le petit jeu ne faisait que commencer.
Je me touchais, imaginant ses doigts, lui offrant mes halètements impudiques. Même à cette distance, je remarquais la chair de poule s'emparant de son corps. Sa queue tressautait au rythme de mon souffle court. J'avais envie qu'il vînt me rejoindre. Lui aussi. Ses muscles s'agitait nerveusement, hors de son contrôle. Il se maîtrisait bien pourtant. J'étais convaincue que s'il y avait mis toute sa rage, il aurait rompu mes nœuds. Mais il était patient, il voulait voir jusqu'où je pourrais nous amener.
D'un mouvement de tête, il m'interdit de jouir ; pavlovienne, je n'eus d'autres choix que de m'y résoudre.
Comme magnétisée, je retournai alors à ses côtés. J'allais continuer à l'asticoter quand je sentis sa main sur ma tête. Je voulus m'écarter de surprise mais sa prise capillaire me retint près de lui. Je levai mes yeux vers lui, stupéfaite. J'avais raison : certains de mes nœuds auraient pu être plus solides. Il ne les avait pas tous défaits mais ses bras étaient à présent libres. Penaude, je me rendais à l'évidence, c'était l'heure de passer à la caisse.
Il me força à sucer sa queue brutalement pour me punir de mon effronterie. M'étouffant sur lui, des sons rauques lui échappaient. Il me laissa reprendre alors mon souffle et un peu de distance. De la bave coulait sur mon menton, je l'essuyai du dos de ma main.
"Va chercher ton collier, dépêche !"
Ayant une sainte horreur des ordres, encore plus de ce type, je fus tentée de lui dire d'y aller lui-même, comme une ultime provocation. Et puis, sa mine sombre m'en dissuada aussitôt. Sans demander mon reste, je descendis. J'avais dû le laisser sur la petite table du salon après notre dernier jeu. Je remontai alors lentement les marches, comme un condamné à l'échafaud. J'étais soudainement moins excitée de savoir ce qu'il me réservait.
"Détache-moi entièrement."
Je n'avais pas encore passé mon collier qu'il me ramenait totalement à ma condition de soumise. Qui allait passer un sale quart d'heure. J'étais certaine qu'il aurait pu le faire lui-même mais sans doute que me voir libérer la bête en tremblant l'excitait davantage. Je soufflai bruyamment pour me donner du courage et optai pour la prudence. Je dénouai ses liens, restant dans l'escalier, sur la pointe des pieds. Je sentis son petit rire face à ma crainte. Je m'empêchai d'en profiter pour le griffer en m'attaquant aux liens. Enfin débarrassé de ses entraves, il se massa furtivement les poignets.
"Monte maintenant."
Il m'attendait sur le palier.

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