Mieux que la télé

Encore une partouze chez les voisins d'en face... Elle en était sûre. 
Des jeunes gens peu vêtus, hommes, femmes, allaient et venaient de la cuisine à la terrasse. Ils s'embrassaient parfois pour se saluer. De chastes bises sur la bouche. Plus torrides qu'un roulage de pelle dans les règles. Elle épiait leur intimité, sans même plus y prendre garde, ni en rougir. Elle ne prétendait même plus s'occuper des plantes sur son balcon, qui en auraient eu pourtant bien besoin. Son sécateur posé sur la petite table de jardin, elle s'était accoudée contre la balustrade, songeuse. Elle avait encore mille questions en tête et ils y répondaient presque docilement à leur insu. 
Ils étaient une petite dizaine à présent. À prendre leur petit-déjeuner. Leurs gestes maladroits et gourds témoignaient d'une nuit trop courte et agitée. Elle ressentait, même de loin, leur conscience de faire partie d'une meute, d'un clan. Elle imaginait des regards jaloux, des intentions suspendues. Inévitables en société. Certains avaient posé leurs fesses sur les genoux d'autres, par manque de place ou par envie. 
Des maillots de bain séchaient encore sur un étendoir ; soirée mousse ? Peut-être...
Le soleil s'était levé depuis longtemps, mais le coin était encore désert. Privilège de l'été. Tout semblait tellement calme. Les gosses n'avaient pas encore colonisé le parc avec leurs cris conquérants. Ça allait être encore une journée chaude, de cette chaleur qui immobilise les corps. Exhortant les habitants à rester au frais, à l'ombre, à l'abri chez eux.
Perdue dans ses pensées indiscrètes, elle se retrouva soudainement plaquée contre la balustrade. Une main sur sa bouche étouffa son cri. Le garde-corps en aluminium encore frais à cette heure la glaçait. Elle voulut s'éloigner. Mais les hanches de son mari collées à son cul la maintenaient résolument. Le bâillon de chair se fit toutefois plus tendre, et elle suça lentement les doigts qui s'invitaient bientôt contre ses lèvres entr'ouvertes. Elle l'entendait soupirer contre son oreille, son homme cherchait son odeur enfouissant son nez dans ses cheveux touffus et indisciplinés. Elle sourit quand l'autre main se glissa entre les plis satinés de son peignoir. Elle ferma les yeux un instant, envisageant qu'ils étaient à leur tour la cible d'autres spectateurs imprévus. La voyeuse matée. Oui, ça lui plaisait...
Il lui susurra alors des mots qu'elle ne comprenait pas exactement.
"... Tu mouilles ? ... C'est mater comme ça qui te rend humide ainsi ? ... Tu mériterais vraiment..."
Elle hocha la tête faiblement et s'abandonna dans les bras qui la ramenèrent à l'intérieur. Ils n'étaient pas des bêtes ; ils n'allaient tout de même pas régler ce scénario sur la terrasse. Ce n'était pas parce qu'elle aimait TV Quartier qu'elle voulait forcément faire partie du programme, de bout en bout, après tout...



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