En-cas d'urgence

"Attache-moi."

Comme un cheveu sur la soupe, elle lui avait sorti ça au dîner. Depuis quinze minutes, elle lui parlait en pensées de ses envies. Ça lui arrivait souvent. C'était la première fois que ça avait dépassé ses lèvres. 

Elle avait même plus sursauté que lui.

Il avait essayé de lui dire que ce n'était pas le moment, c'était préférable de finir le repas et de digérer un peu avant. Elle n'avait rien voulu savoir. Elle avait laissé son assiette en plan et avait monté les escaliers.

"Je t'attends."

Ce qu'elle pouvait l'énerver quand elle faisait sa tête de mule ainsi. Il avait pris son temps pour finir son dessert. Elle mangerait après, elle en aurait plutôt intérêt ; ils n'allaient pas gâcher. Il avait mis du temps à tout préparer pour lui faire plaisir... et elle s'en moquait. Comme d'habitude. À n'écouter que son petit démon intérieur. Le diable au corps.

Il grimpa à l'étage avec la ferme intention de lui faire passer son envie. Pressante.

Elle regardait par la fenêtre, tortillant nerveusement le petit rideau en crochet, de coton blanc qui jaunissait au soleil. Elle se retourna vivement. Elle avait perdu un peu de son assurance. Elle savait que ce n'était pas... bien. Mais il était trop tard pour reculer. Et l'impatience fourmillait encore dans ses nerfs. Elle avait hâte de s'en débarrasser. Elle se plaça au milieu de la pièce, dans un petit sourire de remerciement silencieux. Il lui facilitait les choses, elle ne pouvait que lui en être reconnaissante. 

Elle lui tendit ses poignets, collés ensemble. Et osa encore.

"Avec les chaînes. Tu sais celles que je n'aime pas."

Il eut un petit sourire pervers. Elle avait encore l'audace de lui donner des ordres. Il devait absolument lui rappeler la dynamique de leur couple, ou bien, il sentait déjà la mauvaise pente dans laquelle, ils s'engageraient. La reprendre en main. Elle ne demandait que ça, en plus.

"C'était bien mon intention... Maintenant, tais-toi. Tu perds le droit de parler."

Elle se mordilla les lèvres. Tant de contrition que d'indignation. Mais elle ne voulait pas prendre le risque qu'il la punisse en la privant de ce qu'elle venait chercher, alors elle se tut. Obéissante.